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Janvier 2024 - TF 4A_337/2022 - Arrêt du 24 octobre 2023 - prévu à publication

Bail d’un terrain, résiliation, enlèvement des choses mobilières et remise en état

Au cours des années 1961 et 1963, l’État de Vaud, propriétaire d’une parcelle de près de 90'000 m2 sur les rives du lac de Neuchâtel, conclut quatre contrats distincts avec quatre locataires concernant la location de portions de 400 m2 de ladite parcelle. Chaque contrat de bail prévoit, entre autres, que le locataire a l’autorisation d’installer une maisonnette de vacances respectivement un petit chalet. En cas de résiliation du contrat, l’éventuelle construction doit être enlevée et la parcelle restituée libre de tout aménagement ou construction pouvant entraver son usage par un autre locataire. De 1966 respectivement 1967 au 31 décembre 2000, des droits de superficie sont constitués en faveur des locataires. Par décision du 14 décembre 1994, communiqué l’année suivante aux intéressés, le Conseil d’État décide de maintenir jusqu’au décès des bénéficiaires actuels les constructions en question. Depuis l’échéance des droits de superficie, les locataires continuent d’occuper les terrains, au bénéfice de baux tacites. Par courrier du 26 juin 2019, les locataires sont informés par l’État de la résiliation de leurs contrats de bail pour le 1er avril 2020. Le locataire de l’une des parcelles et les successeurs en droit des trois autres locataires de parcelles contestent ces résiliations.

Afin de statuer sur la validité des résiliations des baux, il est nécessaire d’examiner si les petits chalets construits sur les parcelles sont, au regard des droits réels, des constructions mobilières au sens de l’art. 677 CC ou s’ils en sont des parties intégrantes au sens de l’art. 642 CC. De cette qualification dépend non seulement la question de savoir qui est propriétaire des chalets, mais également la question de savoir s’il s’agit de baux d’habitations qui sont soumis aux règles de résiliations formelles de tels baux et qui bénéficient de la protection des art. 271 ss CO. Aux termes de l’art. 677 al. 1 CC, les constructions légères élevées sur le fonds d’autrui sans intention de les y établir à demeure appartiennent aux propriétaires de ces choses. En droit suisse, la notion s’apprécie subjectivement et objectivement. L’élément subjectif, soit l’intention des parties d’établir une relation temporaire entre la chose et le fonds, revêt une importance particulière et les contrats signés par les parties lors de la conclusion des baux sont déterminants. En l’espèce, les contrats prévoyaient bel et bien que les éventuelles constructions devaient être retirées en cas de résiliation des baux. La Cour constate également que le caractère éphémère de ces constructions a été réaffirmé à plusieurs reprises postérieurement. Le fait que les constructions soient en place depuis des décennies n’est quant à lui pas déterminant, car l’intention doit être examinée au moment de l’érection de la construction. En ce qui concerne l'élément objectif, lorsque l'on se trouve en présence de choses énumérées à l'art. 677 CC, seul un lien avec le sol si intense qu'il faille en déduire d'emblée l'existence d'une partie intégrante, pourrait faire échec à la qualification de construction mobilière. De plus, le Tribunal fédéral rappelle que l’élément objectif ne prime pas l’élément subjectif. En l’espèce, les chalets litigieux sont des constructions en bois ayant pour seules fondations des systèmes de poutraisons enterrés sur une faible profondeur et leurs dimensions demeurent modestes. Sur la base des faits, on ne saurait déduire que l’élément subjectif, c’est-à-dire l’intention des parties d’établir des chalets mobiliers retirés à la fin du bail, devrait être écarté. Il y a donc lieu de refuser le grief. Le Tribunal en fait de même pour les autres griefs des recourants et rejette le recours.